L’histoire des transferts ratés
de Rabah MAJDER c’est une véritable saga à la Lelouch comme dirait Patrick Timsit.
L’idée d’en faire un sujet m’est revenu en voyant l’album de la saison 1987-88
et la page du FC Porto, l’international algérien se trouve en dernière position
et surtout n’a pas le même maillot que ses coéquipiers. La photo de Madjer
ci-contre, laisse même penser qu’elle a été prise plus tard que celle
officielle du début de saison. Ce qui serait assez logique vu comment l’après
victoire en coupe d’Europe des Clubs Champions a été chaotique pour le génial
buteur du talon. Tout commence vous vous en doutez au lendemain de ce triomphe
sur le Bayern de Munich à Vienne où Rabah MADJER, homme du match, devient une
star planétaire avec sa géniale talonnade (voir le sujet : Les trésors dela D2 : Rabah MADJER). Dans une interview à France Football au lendemain de la
victoire de Vienne (n°2147 du 2 juin 1987) le titre ne laisse aucune place à l’ambiguïté .
Madjer : « Je vais quitter Porto ». Dans
cette interview l’algérien revient d’abord sur sa finale, avec une analyse
intéressante. Pour rappel les portugais étaient menés 1-0 après 25 minutes face
au grand favori de la finale et pourtant en seconde mi-temps, les hommes d’Arthur
Jorge ont changé de tactique pour renverser le match et l’emporter 2 à 1 dans
les dernières minutes. Voici les explications tactiques de Madjer : « En
première mi-temps ; il était prévu d’évoluer avec deux attaquants, Paulo
Futre et moi-même. Or finalement au cours de cette première période, j’ai d’avantage
évolué comme cinquième milieu de terrain, venant, à l’occasion, récupérer des
ballons en défense. Mais en seconde période j’ai réellement tenu le rôle de numéro
10 et cela a tout changé. Juary est rentré et nous avons évolué avec deux
attaquants (Futre et Juary) et dès lors nous nous sommes procurer pas mal d’occasions ».
Puis il enchaîne sur les deux actions décisives avec une anecdote peu connue
sur le but de la victoire : « Sur le premier but, après la
percée de Juary, je me trouve dos au but. Je me dis alors que si je me
retourne, le défenseur allemand va me piquer le ballon. Je décide donc de tenter
la talonnade. Tu connais la suite...
Après ce premier but je me suis jeté par terre, pris par l’émotion. Aussitôt, les copains se sont jetés sur moi. J’ai alors été pris de crampes. Je suis allé me faire soigner sur le bord du terrain. Au moment où l’arbitre m’a autorisé à rentrer sur la pelouse, notre arrière central, Celso, m’a adressé une longue balle. Puis j’ai centré pour Juary qui a marqué au second poteau ».
Voilà pour l’histoire et la postérité
mais rapidement l’interview se conclue sur le futur de l’international
algérien. Extrait :
Après ce premier but je me suis jeté par terre, pris par l’émotion. Aussitôt, les copains se sont jetés sur moi. J’ai alors été pris de crampes. Je suis allé me faire soigner sur le bord du terrain. Au moment où l’arbitre m’a autorisé à rentrer sur la pelouse, notre arrière central, Celso, m’a adressé une longue balle. Puis j’ai centré pour Juary qui a marqué au second poteau ».
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Rabah Madjer se faisant soigner juste avant le but de la victoire à la 87ème minute |
- Parlons un peu de ton avenir. Seras-tu encore à Porto l’an prochain ?
- Non c’est une certitude ! Malgré tout l’amour que j’ai pour ce pays et le peuple portugais, j’ai envie de changer d’air, de voir quelque chose de différent. J’ai passé deux ans ici. Pour moi cela suffit car j’ai le goût du risque...
- Ta future destination ?
- Je t’assure que je n’ai pour l’heure aucune proposition concrète. Je peux aller en Italie, en Espagne ou même en France.
Et plus de nouvelles jusqu’à l’automne
1987 où Rabah MADJER malgré ses certitudes post finale, a bien repris la saison
avec le FC Porto jusqu’à ce scoop en une de France Football (n°2169 du 3
novembre 1987) où Madjer lui-même annonce qu’il n’a ni signé en Italie ou en Espagne
mais bel et bien au Bayern de Munich où il évoluera dès la saison suivante.
L’interview est sur trois pages
et quelques jours plus tard, le scoop livré à France Football prend plus d’épaisseur
quand Rabah Madjer pose avec le maillot bavarois :
Mais rebondissement, les
dirigeants de Porto ne valident pas ce transfert sans que l’on sache à l’époque
les raisons alors que le joueur lui certifie avoir signé un contrat. On y voit
un peu plus clair à la fin de la saison, en mai 1988 avec un nouvel épisode de
la saga de ses transferts ratés. Toujours dans France Football (n° 2199 31
mai 1988) l’algérien déclare qu’il évoluera la saison prochaine à l’Inter de
Milan. C’est fait à 95% selon lui !Voici l’interview dans son intégralité
où l’algérien revient également sur l’épisode avorté du Bayern sans toutefois
être très éloquent. Son explication qu’il avait promis aux dirigeants portugais
de ne pas signer de contrat au Bayern la saison suivante (saison 1988-89 où
Madjer est libre de tout contrat) sous prétexte que les dirigeants portugais
étaient en froid avec leurs homologues allemands fait un peu candide dans un
milieu où l’argent fait foi.
Donc ce sera finalement l’Inter
de Milan et là aussi Rabah Madjer officialise sa venue en prenant à nouveau la
pause sous sa future tunique nerazzuri.
Mais vous connaissez la carrière
de Madjer et il n’a pas plus évolué en Italie qu’en Allemagne alors que s’est t’il
passé ? La réponse on l’aura au crépuscule de sa carrière où toujours pour
France Football il revient sur sa carrière dans le n°2291 du 6 mars 1990. Avant
la future Coupe d’Afrique des Nations (qu’il remportera avec les Fennecs)
Madjer explique sa lassitude et sa volonté d’arrêter après la CAN. Dans un
premier temps il annonce arrêter avec la sélection algérienne mais également de
trouver un denier challenge en club où il estime qu’il lui reste encore trois
saisons à faire en pro. Mais une nouvelle fois il annoncera cette saison à
Porto sera la dernière et pourtant ; pourtant comme le chantait Aznave...
Voici l’extrait de l’interview où Madjer laisser planer son spleen :
- A Porto, on dit pourtant que vous êtes le joueur le mieux payé. C’est une motivation, non ?
- Je n’aime pas parler d’argent. Il n’y a pas un professionnel qui en discutera avec vous. C’est comme ça, voilà tout. Tout ce que je peux vous dire, c’est que l’argent actuellement n’entre pas en jeu.
- Alors...
- A Porto j’étouffe.
- C’est votre sixième saison dans le club portugais. C’est encore un signe de fidélité.
- Non, j’étouffe vraiment. Six ans c’est trop. Et puis je ne m’amuse plus.
Les interviews se suivent et se
ressemblent, toujours la même rengaine, Madjer étouffe à Porto et c’est sa
dernière saison. Finalement il rempilera une saison de plus (sa dernière à
porto en 1990-91) avant de finir sa carrière au Qatar après une saison
seulement (1991-92). Mais que s’est-il réellement passé entre lui et le Bayern
de Munich ainsi qu’avec l’Inter de Milan ?
- Ce n’est pas la première fois que vous rencontrez des problèmes à Porto ?
- Non effectivement. Il y a eu d’autres petits trucs.
- Par exemple...
- Faut-il en parler ? C’est le passé...
- Les gens sont curieux.
- Je n’oublie pas qu’on a brisé mon rêve. Tout cela pour des détails.
- C’est-à-dire…
- Et bien ! J’aurais dû jouer au Bayern de Munich. Le problème c’est que les dirigeants allemands m’avaient contacté personnellement. Bien qu’une clause de mon contrat m’autorisait à partir. La direction de Porto, se croyant flouée, s’est opposée à mon transfert.
- Mais vous aviez aussi l’Inter de Milan.
- C’était en 1988 à la même époque. Porto, Milan, le Bayern et moi-même nous sommes assis autour d’une table. Le contrat avec les alleamdns a été cassé. L’acocrd donné à l’Inter.
- Et vous n’y êtes pas allé ?
- J’ai été victime d’une déchirure à la cuiss. M. Pellegrini, le président, a décidé de me faire passer toute une série de tests. Je me souviens d’être parti à Bâle en avion privé avec le médecin du club transalpin. Echographie, auscultation, scanner, on m’a tout fait.
- Et à l’arrivée ?
- Personne à Milan n’osait aborder le problème. Tout le monde était gêné. Finalement j’ai rencontré le président. Il m’a proposé un contrat d’un saison. Il voulait me payer au match. Ridicule. J’ai refusé.
- Il y a eu aussi l’intermède hollandais ?
- Exact. Johan Cruyff est venu me voir plusieurs fois à Valence où j’avais été prêté une demi saison en 1987-88. Il souhait vraiment m’engager. Lui, c’est mon idole. J’aurais donné n’importe quoi pour le suivre.
- Là encore il n’y a pas eu de suites...
- Franchement, je n’ai pas compris. Il s’est passé des évènements bien mystérieux. Même aujourd'hui je n’arrive pas à saisir.
- Vous êtes passé à côté de beaucoup de choses finalement ?
- Je me suis rendu compte que j’étais un instrument. On n’a jamais pensé à ma propre carrière. Peut-être y avait-il trop d’intérêts en jeu ?
- On sent beaucoup de regrets dans votre voix ?
- Oui, j’aurais aimé découvrir d’autre footballs, d’autres pays. Le Bayern, l’Inter et l’Ajax c’était génial. Je n’ai rien eu du tout c’est dingue.
Bon la ficelle est un peu grosse,
l’instrumentalisation, la victimisation cela fait un peu cliché et le
journaliste, Laurent MOISSET, s’en rend compte. Du coup l’interview change un
peu de ton avec des questions plus directes :
- Vous ne vous sentiez pas bien dans le club portugais et vous avez resigné ?
- Avais-je le choix ? J’ai une famille, des enfants à nourrir.
- C’était juste une question d’argent ?
- Dans la vie, où il y a des moments où il faut trancher. A cette époque j’ai d’abord songé au confort et à la sécurité de mon entourage.
- On dit d’ailleurs que Porto (à la fin de la saison 1987-88 ndlr), alors, vous a fait un pont d’or ?
- Je ne parle pas d’argent. C’est tabou. Mais je n’ai pas à me plaindre.
- L’argent semble t’il, a été une donnée essentielle dans votre carrière ?
- Vous plaisantez ou quoi ? Quand j’ai débuté à Porto, un joueur de 4ème division touchait autant que moi. Là on m’a carrément exploité.
Madjer évoque son transfert du
Racing Club de Paris à Porto, pourtant c’est curieux car Madjer jusque là avait
toujours été reconnaissant envers les dirigeants parisiens de l’avoir laissé
partir alors que le club allait redescendre en division 2. Après la finale de
1987 Madjer déclarait qu’il n’y avait aucun esprit de revanche suite à son
échec personnel au Racing et vis-à-vis des dirigeants qui ne l’avait pas conservé
malgré l’envie de construire un grand club dans la Capitale (le projet du futur
ex- Matra Racing). L’algérien déclara même : « Je suis resté le
supporter n°1 du Racing dont je continue de suivre les résultat. Victor Zvunka
et Jean-Louis Piette, le directeur général se trouvaient d’ailleurs à Vienne
pour m’encourager. Je sais aussi que M. Lagardère a toujours eu confiance en moi ».
Changement de ton, trois ans plus
tard : « Le racing ne voulait plus de moi et M. Piette avait chargé
deux imprésarios de mon transfert. Ils ont trouvé Porto, se sont arrangés dans
l’intérêt du Racing. Ils n’ont pas pensé à moi. J’étais la dernière roue du
Carrosse. On a négocié sans s’occuper de moi, je n’étais qu’une marchandise. Je
dis donc que certaines personnes n’ont pas été correctes ». Pourtant le discours de la pauvre victime est mis à mal avec la fin de l‘interview :
- Le milieu du football est ainsi fait...
- Certains évènements se sont produits alors que je manquais d’expérience. Croyez-moi, aujourd’hui, ça ne risque pas de se reproduire. Je connais bien le milieu maintenant.
- Dommage que vous arriviez en fin de carrière.
- J’ai encore trois bonnes années devant moi
- Vous avez des projets ?
- Quitter Porto.
- Encore...
- Oui, je ne m’y plais pas. Je vous l’ai déjà dit
- Pourquoi ne l’avoir pas fait la saison dernière ?
- La bonne opportunité ne s’est pas présentée.
- Bordeaux, pourtant, était décidé à vous engager.
- C’est vrai ; Des dirigeants sont venus me voir.
- Et alors..
- Je désirais sincèrement profiter de cette occasion pour revenir en France. Seulement les Girondins n’ont pas pu s’aligner. Et je n’étais pas prêt à consentir un sacrifice financier. A plus de trente ans, l’aspect financier devient important.
L’argent, bien évidemment, a été
au cœur de sa seconde carrière, celle de l’après finale de Vienne et de sa
talonnade qui l’a fait connaitre dans le monde entier au point que tous les
journalistes lui donnent son nom à chaque nouveau but qui lui ressemble. Il ne
faut pas aller chercher plus loin la raison des transferts avortés au Bayern, l’Inter
ou encore l’Ajax. Le FC porto a cassé sa tirelire pour lui faire un pont d’or.
Une récompense pour ce joueur qui avait hissé le club sur la plus haute marche
et cela reste en somme toute assez logique. Mais il est très probable que ce pont
d’or fût vraiment très conséquent car il a souvent été mis sur la table dans
les problèmes internes au club durant la période qui a suivi la saison 1987/88.
Si on peut comprendre la gêne pour Madjer d’en parler on peut tout autant
comprendre ses choix d’avoir privilégier le confort financier au détriment des
choix sportifs. Il ne faut jamais oublier d’où vient Rabah Madjer et son incroyable
histoire. Madjer signe son véritable contrat PRO (au sens où il ne pouvait vivre
que du football) au Racing en 1983, il a alors 25 ans déjà. Avant ? Il
évoluait dans le championnat algérien mais gagnait sa vie sur le port d’Alger. C’est
ainsi qu’il termine son interview au moment de faire un bilan sur sa carrière
et à la question si il est aigri ? « Non. Finalement, je n’en
suis bien sorti. Je travaillais sur le port d’Alger pour une compagnie de navigation.
J’étais issue d’une famille modeste. Un jour j’ai décidé de tenter la grande
aventure. Et dieu m’a aidé ».
Sources :
France Football n°2147 (2 juin 1987)
France Football n°2169 (3
novembre 1987)Sources :
France Football n°2147 (2 juin 1987)
France Football n°2199 (31 mai 1988)
France Football n°2291 (6 mars 1990)
Le Neymar de l’époque le génie en moins! Je grenouille, je finaude, je joue sur tous les tableaux...
RépondreSupprimerToute cette pleurniche malhonnête pour le fric encore et toujours.