Steaua Bucarest 1985-86, roi d'Europe

Steaua Bucarest champion d'Europe des Clubs ! L’événement extraordinairement insolite marqua une date dans l'histoire du football international. Et même si l'exploit comporte une grosse part de chance, il méritait à l'époque une réflexion sur une Europe qui se tournait vers le football business déjà. Le triomphe des roumains, venait après la démonstration du Dynamo de Kiev face à l'Atlético de Madrid, constituait un défi, voir un pied de nez, aux clubs riches et puissants. La victoire du Steaua tiendrait à démontrer que le travail de formation et la patience peuvent être aussi payants que les politiques de vedettes et de prestige les plus dispendieuses. La victoire de Steuea est aussi dans une logique de progression du football roumain, Université Craiova avait disputé une demi-finale de coupe de l'UEFA en 1983, se faisant sortir par le Benfica qu'à la faveur du but à l'extérieur (0-0 et 1-1), puis un an plus tard c'était le Dinamo de Bucarest qui échouait de justesse en demi-finale de la coupe d'Europe aux grandes oreilles face à Liverpool, futur vainqueur de l'épreuve. Au fil des années, les footballeurs roumains semblent avoir perdu leur timidité, ce complexe d'infériorité que provoquèrent un long isolement, un manque de contact avec l'extérieur, des frontières fermées à double tour pour les meilleurs d'entre eux, placés devant l'interdiction d'aller exercer légalement leur talent à l'étranger, et donc d'apprendre, de progresser. 

Mircea Lucescu, qui a repris en main l'équipe nationale en novembre 1981, sait qu'il est indispensable d'intensifier les efforts sur les jeunes joueurs « Je multiplie les matchs amicaux pour cette raison. Car j'y fais débuter et participer les éléments d'avenir qui ont besoin de s'aguerrir. Petit à petit nous parvenons ainsi à refaire le handicap qui nous sépare des grandes nations du football. Les joueurs roumains réussissent ainsi peu à peu à se décomplexer et notre présence à l'Euro 84 a grandement aidé les joueurs à prendre conscience qu'ils pouvaient lutter avec leurs rivaux étrangers à armes égales ». Ces propos du sélectionneur roumain avaient été prononcés devant les journalistes occidentaux quelques heures avant la finale de Séville entre le Steaua et le Barça.
Sur le terrain, ensuite, l'équipe la plus efficace, la mieux soudée, la plus cohérente dans son jeu était roumaine. Adroits du premier au dernier, toujours soucieux de ne pas perdre le ballon et de l'adresser dans les meilleures conditions à son partenaire, les joueurs du Steaua pratiquèrent un football parfois lent ou ralenti, certes, mais toujours précis, à partir d'un système défensif qui ne se contente pas d'être aussi impénétrable qu'un donjon au moyen-âge mais qui constitue une base solide de lancement pour le jeu offensif de l'équipe. A ce titre le rôle du jeune libéro Belodedici (oui le même qui fera pleurer Basile Boli en 1991 avec l'Etoile Rouge de Belgrade) est primordial dans le système du Steaua.

Mais l'homme le plus important dans le jeu de Bucarest, reste le stratège Ladislau Böloni, sorte de deuxième libéro avancé qui récupère tous les ballons de relance, un peu à la manière d'un Platini sur la fin de sa carrière avec les bleus, où il partait de son camp pour construire le jeu. Le principal regret de cette finale, finalement est que les roumains ne soient toujours pas allés au bout de leurs idées, tardant parfois à soutenir leurs attaquants pour faire la différence dans le temps réglementaire et faisant preuve également de trop d'imprécisions dans leurs tirs ou dans leurs dernières passes. Mais alors il n'y aurait pas eu de place pour la légende d'Helmut Duckadam ! Dans ce match triste à mourir en terme de tirs cadrés et d'actions franches et logiquement stériles de buts au bout de 120 minutes, ce sont les tirs aux buts qui vont déterminer le futur champion d’Europe et dans cet exercice, les gardiens vont s’illustrer. Urruti, le gardien basque du Barça arrête pourtant les deux premiers tirs aux buts roumains, comme souvent des deux joueurs qui se sont le plus illustrés sur le terrain : Boloni et Lacatus mais il concède les deux suivants. 2 arrêts sur 4 c’est tout de même une sacrée performance pour un gardien mais que dire de celle de DUCKADAM en face ! Tout simplement imbattable et jamais vu à un tel niveau de compétition Helmuth DUCKADAM stoppe tout simplement tout les tirs aux buts catalans !! Pas un au-dessus ou à côté, non DUCKADAM arrêtes 4 tirs de suite et pas besoin d’en tirer un 5ème, le STEAUA est champion d’Europe !! Voici les arrêts de Duckadam en vidéo :


J’adore cette vidéo, j’aime voir le public derrière le but qui s’agace à chaque arrêt de DUCKADAM et qui est sans aucune réaction quand il arrête le 4ème, c’est assez incroyable ! Ce mec là a réussi à figer 80 000 personnes ! J’aime bien aussi sur son 3ème arrêt il balance le ballon et tout de suite il s’excuse auprès de l’arbitre (Michel VAUTROT), c'est tout simplement énorme ! En l’espace de 8 minutes chrono, DUCKADAM est devenu un héros national, une icône roumaine, une vitrine pour le régime de Nicolae Ceauşescu (mais ça je l'avais évoqué dans la sordide histoire : "le héros et le dictateur" à lire à tout prix si vous ne connaissez pas l'histoire).
Arrêter 4 tirs aux buts ? Une broutille pour le géant roumain
Mais ce qui est aussi incroyable sur la performance irréelle de DUCKADAM, c'est son analyse, pleine d’humilité : « J’ai eu de la chance de partir du bon côté sur le premier tir. Ensuite, c’est la psychologie qui fait le reste. N’importe quel gardien aurait pensé pareil ». J'adore cette fausse modestie ! Böloni lui sait à quel point leur gardien a été primordial pour ses coéquipiers : « Quand j'ai manqué le deuxième tir au but, j’étais dans un état difficile à décrire, je ne souhaite personne d'en passer par là. Heureusement Duckadam a été héroïque en arrêtant les quatre tentatives espagnoles. A chaque fois c'est lui qui a permis à l’équipe de conserver sa confiance en elle jusqu’au bout ». Voici l'effectif des champions d'Europe 1985-86 :

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