Voici un
petit florilège de ce qui fait le derby depuis 1951, des actions,
des paroles qui résument l'esprit d'une rivalité forte 365 jours
par an. En commençant par Robert Herbin, sûrement l'homme qui a le
plus disputé de derby ! 24 derbys en tant que joueur et 25 en
tant qu’entraîneur et sur les bancs de touche des deux équipes et qui résume le mieux la rivalité St-Etienne-Lyon en
une seule phrase « Le derby c'est avant tout un match de
supporters ! ».
Georgres BERETA « le
lapin »
Dimanche 19 mars 1967,
c'est une pluie de carottes qui s'abat sur la pelouse de Geoffroy
Guichard. Tout est parti d'une déclaration de Jean SNELLA,
l’entraîneur des verts un mois plus tôt, à l'issue d'un match de
coupe de France. Pour lui, Lyon ne méritait pas sa victoire et va
déclarer : « A trop jouer la carotte, Lyon n'ira pas très
loin en coupe. Lyon est une équipe qui ne sait que défendre ».
Louis HON son homologue lyonnais saura lui répondre avec un « Au
moins nous irons plus loins que St-Etienne en coupe ». Mais
tout ceci n'est qu'un préambule sur ce qui va rester l'un des
épisodes les plus marquants de l'histoire du derby. Les supporters
lyonnais de « L'Ours blanc » ont encore les mots de
Snella à l'esprit et avant de se rendre à Geoffroy Guichard, ils font
une halte au marché gare et font le plein de carottes. Autre époque
autre mœurs, il n'y a pas une fouille systématique des supporters
avant d'entrer au stade et lorsque les deux équipes pénètrent sur
la pelouse c'est une pluie de carottes qui tombent devant les joueurs
de St-Etienne. Mais les joueurs ne se démontent pas et en
particulier le capitaine Jean Bereta. Le natif de
Saint-Etienne raconte son geste : « Pour leur
faire comprendre que cela ne nous touchait guère, j'ai ramassé une
carotte et je me suis présenté devant la tribune, et je l'ai croqué
à pleine dents ». On a évacué les carottes et le
match a eu lieu. Les verts l'emporteront 2-1 et le mot de la fin sera
pour Roubert Nouzaret, joueur de Lyon (et futur entraîneur des deux
équipes) : « Je souhaite à l'ASSE d'être champion
et à l'OL de remporter la coupe ». Bien vu Nouzaret, c'est exactement ce qu'il se passera lors de cette saison 1966-67.
Dans le même (bon) esprit on peut noter, la bonne blague de ce
supporter stéphanois venu offrir une playstation à Jean-Michel
AULAS à Geoffroy Guichard après que ce dernier avait déclaré
après la défaite des siens au match aller : « Nous
jouons en ligue des Champions, alors que les stéphanois la disputent
sur Playstation ».
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Les supporters de l'Ours Blanc balancent des dizaines de kilos de carottes sur la pelouse |
Rémi GARDE, le gone
Ancien pensionnaire du
centre de formation, l'actuel entraîneur de l'Olympique Lyonnais a
été rôdé aux joutes verbales du derby depuis son plus jeune âge.
Le natif de l'Arbresle soutien Lyon depuis son plus jeune âge dans
une région où on était plutôt estampillé vert à l'époque et il
à l'habitude de ce chambrage réciproque cependant il tient toujours
à rappeler : « Il ne s'agit que de sport. Il faut
être vigilant, et ne pas oublier de quoi on parle. J'essaye toujours
d'être mesuré, car ces dernières temps trop de débordements ont
eu lieu. Des débordements sympathiques et gentillets d'accord. La
violence non ! ». Puis de rajouter comme un
avertissement qui colle si bien à la situation d'aujourd'hui : « En
tant qu'acteurs principaux on ne doit pas envenimer les choses. Mais
attention il ne faut pas éteindre toute cette passion car c'est
magnifique ». Enfin il y a une autre citation que
j'aime beaucoup de Rémi Garde sur les derbys et qui datent du temps
où il était capitaine de l'OL pendant les années Domenech. « Le
derby c'est un match de coupe qu'il ne faut pas perdre, c'est une
question d'honneur. C'est ce que je tentais d'expliquer aux joueurs
qui arrivaient à l'OL quand je suis devenu capitaine. J'essayais de
leur transmettre la fibre du derby. Parfois les mecs me disaient
"Oui, moi, tu sais, j'ai déjà joué des derbys, je sais ce que
c'est". Et puis une fois le match terminé, ils revenaient : "Ah
ouais c'est quand même par pareil" ».
L’entraîneur des champions du monde connaît aussi très très
bien le derby, il a été joueur de Saint-Etienne puis de Lyon avant
de devenir l’entraîneur de l'OL. Alors quand il parle du derby, on
se tait et on écoute : « Le derby est un grand
moment de football régional, surtout quand on est natif de
Saint-Etienne et que, comme moi, on a été joueur des deux clubs.
C'est un grand moment de bonheur, un grand moment d'échange. Ce
match engendre de la joie dans les deux villes et même dans toute la
région Rhônes-Alpes. De cette période il me reste un souvenir
global et quelques flashs comme les claques infligées à Lyon, le
7-1 ou le 6-0. Ou encore le triplé de Di Nallo en coupe, un sacré
match ! Il y a eu aussi cette petite histoire de carottes.... Je
retiens du derby surtout ce fantastique côté pimenté. Nous,
joueurs nous tenions énormément à cette rencontre. C'est vrai qu'à
l'époque, l'ASSE était au dessus de l'OL. On se savait meilleurs
que les lyonnais mais sur le championnat complet, pas sur le derby.
On se méfiait de l'OL. Jamais il n'y a de suffisance de notre part.
Pas question de prendre les Lyonnais de haut. Cela dit, quand on
gagnait le derby, on se laissait un peu aller, on en rajoutait un
peu. Toute la panoplie du chambreur y passait. Comme disait Roger
Rocher, Lyon était dans le rétroviseur de Saint-Etienne ».
« Je n'ai jamais joué avec le maillot de Lyon sur la
pelouse de Geoffroy Guichard. Par contre, je suis revenu à
St-Etienne en tant qu’entraîneur de l'OL. D'ailleurs je me suis
rendu compte qu'il était plus facile de préparer une équipe pour
le derby que pour un autre match. La motivation est toute trouvée
pas besoin de longs discours. Tout va pour le mieux même si il y a
toujours une légère inquiétude qui trotte dans un petit coin de
votre tête : celle de prendre une valise. Je pense que le
derby avec cette approche de match si particulière, m'a servi plus
tard dans ma carrière. J'ai retrouvé cette passion avec la coupe du
monde en France. C'est la même façon de préparer et de vivre un
match, un grand match. Oui, la culture du derby m'a servi pour
devenir champion du monde ». La je crois que c'est
comme un café Maxwell, pas la peine d'en rajouter.
Raymond est peut être avec Jean-Michel AULAS, l'homme qui a le plus
énervé les supporters verts, il est celui qui n'aura jamais cessé
de mettre de l'huile sur le feu qu'il soit joueur ou entraîneur de
l'OL. Voici un florilège de ces petites phrases qui avaient mis en
ébullition plus d'un derby et ensuite l'explication de toutes ces
phrases par Raymond lui-même. « A l'envers comme à l'endroit,
le maillot vert me donne des boutons ». « Un vert ça va,
30000 bonjours les dégâts ».. « j'aime le théatre
parce que le vert y est la couleur maudite ». Mais toutes ces
petites phrases comme toujours avec Raymond c'est du théâtre, c'est
sa façon de concevoir le football. D'ailleurs il s'en explique « Moi
j'ai débuté à l'OL à 8 ans alors le derby je connais. En plus en
équipe de France juniors, on voyageait ensemble, on vivait ensemble.
On jouait dessus, je me souviens d'un truc extraordinaire. On
revenait d'un match avec les espoirs et on affrontait les verts trois
jours plus tard. J'ai fait le retour en avion avec Christian Lopez,
Sarra (Christian Sarramagna), Jacquot (Santini) et Bernard (Lacombe).
On discutait et ça se chambrait sur le match, on se chauffait
c'était logique. En rigolant, pour faire peur à Sarramagna, le lui
lance "Toi, tu ne feras pas plus d'un quart d'heure !".
Il a fait 20 minutes. Mais je ne l'ai pas fait exprès. On est arrivé
épaule contre épaule et s'est pris le pied sur un bout de
ferraille, près de la rambarde. Pas de chance et double entorse pour
lui. Quelque part ça crée les légendes ». Une fois
entraîneur continuera les déclarations provocatrices. A l'approche
d'un derby, Domenech c'était un baril de poudre avec la mèche
constamment allumé ! « Les déclarations ? Il
faut chambrer un peu, cela fait partie du spectacle. Pour ne pas
perdre à l'esprit, il faut que tous les acteurs jouent leur rôle.
Maintenant dans les interviews, les mecs disent tous le même chose .
C'est chiant. Une année j'ai déclaré que les verts me donnaient
des boutons. Résultat 37 000 personnes à Geoffroy Guichard et
aucun problèmes entre les supporters. La saison suivante on m'a fait
comprendre que j'étais allé trop loin alors j'ai dit que c'était
une journée de championnat comme les autres. Il n'y a eu que 18 000
personnes et des bagarres dans le stade. Comme quoi il faut mettre la
vraie pression. Il ne faut pas laisser les agitateurs s'occuper du
derby ». Jérémie Janot abondait dans ce sens, c'est
ce qu'il avait dit après la fameuse déclaration d'Aulas sur la
playsation et que c'était ces petites phrases, ces petites piques
qui faisait l'essence du derby et se réjouissait même que cela
assurait une ambiance de feu au retour à Geoffroy Guichard. Enfin
pour finir avec Raymond Domenech, voici son mot de la fin, c'est
bizarre mais cette déclaration on l'a beaucoup moins lue dans les
médias, comme quoi il a raison, il faut mettre l'huile sur le feu
pour assurer un bon spectacle : « La liste de mes
déclarations sur les verts est longue mais ce n'est que de l'humour
bien sûr. D'enfant supporter à joueur puis entraîneur, j'ai vécu
les plus belles, les plus intenses pages footballistiques de ma vie,
celles où j'ai noué dans l'adversité et le respect de l'autre de
solides amitiés (avec des verts oui!). J'ai de la famille, des amis à St-Etienne, je n'ai jamais été un anti-stéphanois, je suis un metteur en scène d'un spectacle, un spectacle qui s'appelle le derby ».
Avec 14 réalisation face à Lyon, il est le meilleur buteur de
l'histoire du derby (à égalité avec Fleuri Di Nallo dans ce
classement particulier). Il dispute son premier derby en 1965 et bien
entendu il marquera. : « Je suis très fier
d'être le meilleur buteur stéphanois dans le derby. C'est
d'ailleurs marrant de voir que j'en ai marqué autant que Di Nallo.
Mais en championnat c'est moi qui suis devant ! Comme quoi, même
pour ce genre de détails, il y a toujours une petite guéguerre qui
me fera sourire ». L'ancien buteur des verts est
aujourd'hui une figure de la vie lyonnaise.....pour les stéphanois.
En effet Hervé REVELLI est le propriétaire d'un bar-restaurant sur
la Presqu'ïle à quelques mètres de la boutique de l'OL. C'est une
affaire familiale et Hervé Revelli s'y rend souvent car le lieu est
un fief des anciens joueurs de l'ASSE entre autres. Il y règne une
bonne ambiance, comme le décrit l'ancien buteur : « En
20 ans, aucun incident n'est à déploré, ni même de l'animosité,
on se chambre juste gentiment entre lyonnais et stéphanois ».
Au fait son restaurant, au cœur de Lyon, il n'a pas hésité à
l'appeler le petit vert.
Même si il ne veut jamais en parler, Bernard LACOMBE a porter le maillot vert pendant une saison au cours de l'exercice 1978-79. Mais Lacombe est un vrai lyonnais et sa vie a été rythmé par le derby pourtant il a toujours eu du mal a brillé dans ses rencontres si particulières, comme si l’événement le dépassait : « Je garde tout de même des souvenirs mitigés des derbys. Lors du dernier derby avec Lyon, je rate un penalty à Geoffroy Guichard en fin de match et on perd 1-0. J'ai été malade pendant trois jours. Six mois plus tard, je retrouve le derby mais, cette fois à Gerland sous le maillot de Saint-Etienne. L'accueil du public lyonnais a été formidable, mais j'ai été paralysé pendant tout le match (voir le sujet : Le jour où Bernard LACOMBE est revenu à Gerland avecles verts ».
Le malien était un attaquant fantastique pourtant quand on lui parle
de derby, ce n'est pas de ses buts face aux lyonnais dont il se
souvient en premier. « Cette équipe ne m'a jamais
vraiment réussi. Je n'aimais pas trop jouer contre l'OL. Lyon était
une équipe dure, très dure, vraiment pas facile à jouer, ni à
Gerland, ni à Geoffroy Guichard. La défense était vraiment trop
rude à mon goût. Les Baeza, Lhomme, Mihajlovic et Domenech étaient
tous sauf des enfants de cœur. Franchement j'avais parfois la
trouille de jouer contre eux. Pour me protéger, je mettais deux
protèges-tibias à chaque jambe. Un devant, un derrière !
Comme cela, j'évitais les coups un peu trop durs. Mais c'est normal
il fallait prendre des précautions avant d'aller à Lyon. Une fois à
Gerland, on pouvait heureusement compter sur le soutien de nos
supporters, ça me donnait un peu du baume au cœur ».
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Beretta à terre et Keita lève les mains, l'ASSE marque 7 buts à Gerland ! |
Il succède à la légende Marcel AUBOUR, qui n'avait jamais battu
les verts avec d'entrée un succès de prestige dans le derby 3-0. Si
lors de ces 4 premiers derbys il ne connaît pas la défaite, la
chute va être plus vertigineuse : « La saison
1969-70, reste un très très mauvais souvenir. Quand vous prenez 7
buts à domicile, qui plus est lors d'un derby, on ne sort pas
indemne. Si seulement à la fin du match, j'avais pu entrer dans un
trou de souris. Malheureusement cela ne s'est pas arrêté là. Les
stéphanois en ont remis une couche lors du match retour. J'ai
encaissé cette fois 6 buts ». Treize buts en deux
derbys, le cauchemar pour le sympathique gardien lyonnais qui
garde quand même des bons souvenirs du derby, comme celui de 1980
« Quel grand souvenir, on a battu le record de spectateur
du championnat de France. Il y avait des gens partout. Sur les
tribunes, sur les pylones. C'était hallucinant ».
Enfin Yves Chauveau reste philosophe et conserve toujours son humour
malgré la pluie de buts qu'il aura encaissé tout au long de sa
grande carrière face aux verts : « Je garde de
bons souvenirs même si à notre époque, c'était les stéphanois
qui dominaient les débats. Je ne peux tout de même pas en vouloir à
mes parents de m'avoir fait naître trop tôt ».
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9 septembre 1980 record d'affluence avec 48 552 spectateurs |
Source : OL-ASSE histoire d'une rivalité de Sébastien Vuagnat et Cyrille Collot
tu chauffes le Muller là ;-)
RépondreSupprimerPas besoin à la veille des derby il ne dort plus trois jours avant en espérant une victoire à Geoffroy Guichard
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