17 janvier 1989, Fernando
REDONDO à 19 ans et joue déjà pour Argentinos Juniors en première
division Argentine. Mais ce jour-là il va surprendre tout son monde
en déclarant à la presse qu'il renonce à la sélection. En effet
Carlos Bilardo l'avait convoqué pour un stage de préparation de la
coupe du monde 1990 mais Fernando Redondo décline sous un prétexte
fallacieux « Je dois terminer mes études de
Sciences-économiques ». Pour le jeune milieu de
terrain les études seraient plus importantes que la coupe du monde ?
Non, bien sûr que non, c'est un secret de polichinelle que le joueur
d'Argentinos Juniors n'appréciait pas du tout la vision de Bilardo
et surtout il n'avait pas apprécié que Bilardo l'exclue d'une
tournée en Australie...dans le hall de l'aéroport. Mais l'histoire
ne s'arrête pas là et les événements vont nous révéler un peu
plus d'infos sur les vrais motifs de ce refus. Trois semaines plus
tard c'est son coéquipier en club, Oscar Deyrticia qui déclinait la
sélection. Pour le meilleur buteur du championnat argentin à
l'époque, le motif était plus direct : « Je m’entraîne
très bien avec Argentinos. Je n'ai pas envie de travailler toute la
semaine avec l'équipe nationale ». Carlos
Bilardo voit rouge face à ces deux refus et déclare que tant qu'il
sera sélectionneur il ne les convoquera plus, tout en soulignant que
les deux joueurs jouent pour le même club et sont sous l'influence
de leur entraîneur Nito Veiga. Il est vrai qu'Argentinos, à cette
époque, développait un football offensif, à l'opposé du style
Bilardo mais les raisons des refus de Redondo et Deyrticia sont moins
poétiques et sont plus dictées par des dispositions financières !
En effet les deux hommes sont en contacts avec des clubs italiens et
espagnols, des clubs qui exigeraient, pour que les transferts aient
lieu, une pleine disponibilité des deux joueurs. La preuve de mes
dires ? Fernando REDONDO quelques semaines après avoir "déserté"
la sélection arrêtera ses études si importantes de sciences
économiques pour aller jouer en Liga !
Redondo retrouvera la
sélection sous les ordres d'Alfio Basile, avec qui il remportera la
Copa America 1993 et sera de la campagne mondiale au États-Unis
l'année suivante. Mais la sélection argentine connaîtra une grosse
déconvenue au mondial 94, avec l'exclusion de Diego et une
élimination en huitième de finale. Alfio Basile n'est plus à la
tête de l'Albiceleste et Daniel Passarella le remplace avec
des idées précises sur la tenue que doit avoir sa sélection. En
septembre 1994, quand il succède à Alfio Basile, Passarella
entreprend de transformer la sélection argentine en commando. Parmi
les mesures destinées à établir son autorité et à rassurer les
braves gens après la suspension de Maradona, il impose des
Rhinoscopies à ses joueurs pour détecter d'éventuels cocaïnomanes
et décrète l'immédiate prohibition des boucles d'oreilles et des
cheveux longs ! L'homme se justifie : « On a calculé
qu'un joueur aux cheveux longs se les réacommonde près de cent fois
par match et qu'il perd donc sa concentration ».
Quelques internationaux se réfugient derrières les idées-reçues
du football patrie "la sélection au-dessous de tout".
C'est l'argument de Gabriel Batistuta quand il coupe "timidement"
ses boucles. Mais d'autres élèvent la voix et en premier lieu Diego
Maradona, qui déclare dans un parlé qui lui colle si bien : « Et
si un joueur à l'habitude de se toucher les couilles, on les lui
coupe aussi ? ». Fernando REDONDO tout comme Claudio
CANIGGIA, refuseront eux de toucher à leurs cheveux et de se mettre
au pas du nouveau sélectionneur. Fernando REDONDO va une fois de
plus aller dans le conflit avec un sélectionneur national. Tout
commence en septembre 1995, Passarella et son adjoint Gallego, se
rendent à Madrid pour rencontrer Redondo. Passarella a l'intention
de lâcher du lest sur les mèches et vient annoncer au nouveau
joueur madrilène qu'il compte sur lui mais il va être pris de
court. Redondo déclare dans la presse espagnole qu'il refusait de
jouer en sélection tant qu'on lui demandera de passer à la tondeuse
! De retour à Buenos-Aires, Passarella répond dans la presse
Argentine : « Redondo ne dit pas la vérité ! Et il
refuse la sélection car il ne veut pas jouer sur le côté gauche
! ». Le joueur du Real s'offusque « Le
thème de la position s'est discuté cinq minutes pendant lesquelles
j'ai dit préférer jouer au centre et ne s'est pas vraiment débattu
car le désaccord préalable était la longueur de mes cheveux. Le
menteur c'est Passarella ! ». L'affaire fait les choux
gras de la presse en Argentine, qui prend plutôt le parti populaire
et favorable....au joueur. Il faut dire que la sélection peine, le
milieu de terrain argentin est peu inspiré et Redondo brille de
mille feux en Espagne. Pour calmer la presse, Passarella met alors de
l'eau dans son vin « la longueur des cheveux n'est pas un
critère déterminant à l'heure du choix » dit-il
début 1996 et les mots s'accompagnent des faits.
Passarella appelle
Caniggia, l'autre rebelle qui ne voulait pas toucher à sa crinière
blonde, qui plane avec Boca Juniors et sur le championnat local. Un
an et demi plus tard, octobre 1997, la situation n'a pas changé,
l'Argentine est toujours en difficulté et Passarella voit plusieurs
de ses titulaires indisponibles dont Matias Almeyda suspendu pour les
prochains matchs. Le contexte, le prétexte est idéal pour essayer
de rattraper le coup. Passarella convoque Redondo du bout des lèvres
: « il est invité ». Le sélectionneur
invoque le besoin de « tirer un trait sur le passé ».
On oublie tout ? Non. Redondo refuse l'amnistie-amnésie. Il demande
à Passarella de se dédire des accusations de mensonge. Passarella,
bien sûr, refuse. Le ton monte. Personne ne cède. Maradona lui ne
rate pas l'occasion de glisser un tacle à Passarella, qui décidément
il apprécie peu « Maintenant, on sait qui mentait et qui
ne mentait pas ». Luis César Menotti prend aussi la
défense du joueur Réal : « Redondo est fidèle à ses
convictions ». Tant pis pour l'Argentine, tant pis pour
le foot que Redondo incarne, qui n'est pas précisément le même que
celui de Passarella. Tant mieux diront certains pour la liberté de
la dignité défendues. Redondo ne marche pas au pas cadencé. Il
avance d'un pas courageux et élégant, comme sur le terrain. Avant
la coupe du monde, les avis sont partagés, un sondage révèle que 5
argentins sur 10 sont d'accord, 4 soutiennent le sélectionneur
(reste toujours celui qui ne se prononce pas). Mais après le
mondial, les avis sont beaucoup moins favorables pour les deux
protagonistes et nombreux sont les argentins qui en veulent aux deux
hommes de s'être enfoncer si profondément dans la bêtise et avoir
fait passer un prétexte aussi futile que la longueur des cheveux
au-dessus de la cause nationale. Surtout qu'après la coupe du monde, Redondo se les coupera ses cheveux. Passarella a du s'étouffer quand il a vu ça :
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